L'euthanasie des patients psychiatriques requiert la plus grande prudence. Le Journal du Médecin.
L'euthanasie des patients psychiatriques requiert la plus grande prudence. Le Journal du Médecin, Nicolas de Pape, Senior Writer, 06/05/19 à 11:48. Mise à jour le 16/05/19 à 13:21
L'Ordre des médecins (conseil national), s'appuyant sur sa Commission euthanasie s'inspirant elle-même de l'Association flamande de psychiatrie et la Société royale de médecine mentale de Belgique donnent quelques directives aux médecins confrontés à une demande d'euthanasie d'un patient psychiatrique. Cet avis de l'ordre complète la Loi euthanasie. Grosso modo, le conseil national recommande d'être extrêmement prudent... © le Journal du médecin/Roularta HealthCare.
La Loi euthanasie autorise, sous conditions, l'euthanasie de patients psychiatriques.
Deux autres médecins doivent être consultés. De facto, il doit s'agir de deux psychiatres. Chacun s'assure " du caractère constant, insupportable et inapaisable de la souffrance physique ou psychique ". Par souci de prudence, en matière psychiatrique, l'Ordre recommande que les trois médecins (le médecin traitant et les deux psychiatres) se voient physiquement. Ils rédigent un rapport commun sans être pour autant d'accord sur tout. L'équipe de suivi (soignants, psychologues, psychothérapeutes) doit être impliquée également.
L'Ordre demande que l'Inami prévoie le remboursement de cette concertation physique sous la dénomination " Consultation euthanasie multidisciplinaire " (CEM), par analogie à " Consultation oncologique multidisciplinaire " (COM) en oncologie.
L'Ordre souligne que la détermination du manque total de perspective dans le cas d'une pathologie psychiatrique est une tâche complexe pour le médecin, tenant compte notamment de l'incidence élevée de suicides et du fait que la pathologie psychiatrique en elle-même ne mène pas à la mort.
Traitements EBM
Le médecin doit s'assurer que tous les traitements EBM ont été utilisés avant de décider du caractère " incurable et sans perspective " de la pathologie. Si le patient a refusé l'un de ces traitements, le médecin ne peut pas pratiquer l'euthanasie. En même temps, le médecin ne peut pratiquer l'acharnement thérapeutique.
S'il estime que le patient ne décédera pas à brève échéance, le médecin doit laisser s'écouler un mois au moins entre la demande écrite du patient et l'euthanasie. Pour s'assurer de l'aspect persistant de la demande, le médecin mènera plusieurs entretiens espacés dans le temps. Le délai d'un mois n'est pas suffisant en l'état, étant donné que les maladies psychiatriques peuvent évoluer rapidement dans un sens positif.
Consulter les proches
Le médecin doit également consulter les proches " à moins d'avoir de bonnes raisons de ne pas le faire " car des conflits sont possibles entre l'autonomie du patient et l'intérêt des familles. Les proches peuvent renseigner le médecin traitant de pressions éventuelles. Le conseil national renvoie à cet égard aux directives de l'Association flamande de psychiatrie " Richtlijn verzoek om hulp bij zelfdoding door patiënten met een psychiatrische stoornis ".
Si le médecin pratiquant l'euthanasie s'est assuré " que le patient est doté de la capacité de discernement et est conscient au moment de sa demande ", il ne commet aucune infraction. Cette capacité de discernement est du ressort de la Justice de paix mais le médecin a un devoir d'appréciation également. " Une pathologie psychiatrique n'implique pas automatiquement que le patient ne puisse pas formuler une demande d'euthanasie réfléchie et valide. " Là-aussi, le conseil national renvoie aux directives ci-dessus.
Enfin, bien sûr, aucun médecin n'est tenu de pratiquer une euthanasie.© le Journal du médecin/Roularta HealthCare.